Vive mes ongles de toutes les couleurs ! par Alicia Acosta, Luis Amavisca et Gusti Un récit juste et utile, celui d’un petit garçon qui aime colorer ses ongles… sauf que cela signifie sortir de la norme et, attirer les moqueries des autres enfants. Un album qui n’est ni moralisateur, ni larmoyant. Une jolie histoire, autour de la différence, et une fin remplie de tendresse. À partir de 3 ans. Nathalie F.
Aux douceurs enchantées, tome 1 : Les sablés de la Métamorphose par Aurélie Gerlach Mignonne tout plein, la série Aux douceurs enchantées parle de magie… et de pâtisseries ! Dans ce premier tome, nous faisons connaissance avec la jeune Candy dont la grand-mère, Madeleine Ladouceur, tient une pâtisserie où elle confectionne des gâteaux magiques grâce à un grimoire secret se transmettant de générations en générations. Afin de lui léguer la boutique, Madeleine va mettre à l’épreuve sa petite-fille en lui faisant préparer tout un tas de recettes qui permettront de déterminer si elle possède les pouvoirs magiques nécessaires. Candy deviendra-t-elle une pâtissienne comme sa grand-mère ? Ce n’est pas forcément gagné d’avance ! Idéal pour les premières lectures, ce petit roman facile à lire est accompagné de jolis dessins en couleurs pour mieux mettre un visage sur les personnages sympathiques et attachants de l’histoire. À la fin du livre, les gourmands pourront même tester une recette de sablés de métamorphose fort appétissante… à partager avec leurs bibliothécaires préférés, bien sûr ! À partir de 7 ans.
Ultimage le maître des magies, tome 1 : Les quatre éléments d’Adrien Tomas Maël a perdu son père. Sa mère et lui sont contraints de déménager en Bretagne où vit le reste de leur famille. Le garçon y découvre un gros livre marqué de signes étranges qui fait basculer sa vie. Un corbeau doué de parole l’entraîne dans le monde d’Oara, où la magie des éléments existe. Pour rentrer chez lui, Maël devra devenir un Ultimage, comme son arrière-grand-mère avant lui. Le problème c’est qu’un sortilège vieux de 400 ans a fait disparaître tous les Ultimages d’Oara. Heureusement, Maël pourra compter sur Quana, apprentie mage du feu, pour l’aider dans sa quête… Il y a du Avatar, le dernier maître de l’air dans cette trilogie dont le premier tome nous a particulièrement emballé. Les pages s’enchaînent sans temps mort. Les belles illustrations d’Elisabeth James contribuent à une immersion totale dans l’histoire. Les manipulations magiques du monde d’Oara pourront servir de réflexion aux jeunes lecteurs : à quel moment un bien individuel devient-il un mal collectif ? À partir de 9 ans.
Les enfants des saules de Charlotte Bousquet Melvin, Imaya et Jade sont tous les trois des élèves de l’école alternative « Au blé en herbe ». Ils vivent dans un agréable village de campagne. Mais depuis quelques temps, des évènements étranges se produisent. Des animaux sont blessés, voire tués, les récoltes ne donnent plus rien. Quand Théo et Morgane viennent s’ajouter au groupe des trois autres, une connexion entre eux se créée, leur permettant d’accomplir des prodiges. Ensemble, ils vont essayer de venir en aide aux animaux et à la nature contre le mal qui les gagne. Mais malgré leurs incroyables pouvoirs, Melvin et ses amis restent avant tout des enfants, avec les problèmes liés à leur âge. Ce qui ne leur facilitera pas la tâche… À partir de 9 ans.
L’île au manoir d’Estelle Faye
Estelle Faye s’est taillé une réputation dans la littérature de genre pour adultes. Avec cette histoire de fantômes, elle s’adresse maintenant au jeune public. Nous y suivons Adam et ses deux amis Gaël et Adelis, sur une île perdue au milieu de l’Atlantique. À la nuit venue, Adam voit sur la plage une jeune fille du nom de Sélène. Elle implore son aide…
1. Rayon 7-11 ans : MALENFER de Cassandra O'Donnell
Prenez un frère et une sœur, Gabriel et Zoé, vivant aux abords d’une forêt maudite qu’ils doivent sauver de la malédiction. Ajoutez-y une prophétie, des parents perdus on ne sait où, un sorcier prétendument venu aider nos héros, et vous n’aurez plus qu’une idée en tête : dévorer tous les tomes que compte la série (7 à ce jour) pour savoir comment Gabriel, Zoé, leurs trois meilleurs amis et leur dragon des ténèbres vont se tirer de cette affaire !
Pour les amoureux d’univers magiques, peuplés de créatures fantastiques.
À partir de 9 ans.
2. Rayon 7-11 ans : L'HERBORISTE DE HOTEFORAIS de Nathalie Somers
On était habitué à voir des animaux fantastiques partout. Pour changer, Nathalie Somers propose de nous intéresser aux plantes fantastiques, dans ce court et très sympathique roman se déroulant dans le monde magique de la trilogie Roslend. Nous y suivons le jeune Ywen à la recherche de sa mère disparue, fameuse herboriste enlevée par les hommes du duc d’Hoteforais. Le périple d’Ywen sera l’occasion de découvrir tout un tas de plantes aux incroyables vertus, depuis la rarissime fleur d’evi jusqu’aux planantes feuilles de coptère. De quoi sensibiliser à l’écologie, de façon ludique, les jeunes lecteurs.
Les illustrations efficaces de Juliette Laude permettent une plus grande immersion dans cet univers qui emprunte aussi bien aux codes de l’heroic fantasy qu’aux trouvailles astucieuses du Dernier maître de l’air.
À partir de 9 ans.
Vous voulez plus de plantes magiques ?
Lisez donc le manga de Shin'ya Komatsu Un été à Tsurumaki, où un petit garçon dérègle l'horloge magique de la nature, le temps d'un été.
À emprunter au rayon manga jeunesse !
3. Rayon DVD : LA VIDÉOTHÈQUE DE PIERRE LAPIN inspirée des œuvres de Beatrix Potter
Beatrix Potter (aucun lien de parenté avec Harry) n’est ni plus ni moins que l’une des plus grandes illustratrices jeunesse de tous les temps. Ecrivaine, botaniste, mycologue, c’était une véritable touche-à-tout. On lui doit pas moins de 23 contes qui lui apportèrent une gloire éternelle. Parmi ses personnages les plus célèbres, on compte les facétieux Pierre et Jeannot Lapin.
Plusieurs de ses contes furent adaptés en dessins animés dans les années 1990. Même si ces adaptations commencent à dater, leur côté désuet apporte une touche vintage qui se marie parfaitement bien avec l’univers de Potter. Les bêtises de tous ces petits lapins, chatons et canards sauront encore ravir les enfants d’aujourd’hui, tout comme les magnifiques dessins, fidèles au style original de la grande illustratrice anglaise.
À partir de 5 ans.
Vous voulez plus de Beatrix Potter ?
Regardez donc le film de Will Gluck, Pierre Lapin, version récente du célèbre conte, avec des images de synthèse et pour toute la famille.
À découvrir au rayon cinéma jeunesse !
1. Littérature adulte : LA FUREUR DES HOMMES par Charles O. Locke
C’est en 2012 que les éditions Actes Sud et le réalisateur Bertrand Tavernier entament leur collaboration sur la collection « L’ouest, le vrai » dans le but de faire découvrir aux lecteurs français les romans à l’origine des plus fameux westerns. La fureur des hommes est l’avant-dernier né de cette collection. Initialement publié aux États-Unis en 1957, il n’avait jamais été traduit en France malgré une adaptation cinématographique en 1958 par Henry Hathaway (voir l’excellente postface de Monsieur Tavernier à ce propos).
Le roman met en scène une chasse à l’homme, celle du jeune Tot Lohman, coupable malgré lui d’avoir tué l’un des fils Boyd. Même si Lohman est un garçon droit dans ses bottes, qu’il était en position de légitime défense, le reste du clan veut lui faire la peau. Les Boyd sont de riches propriétaires texans. Ils s’imaginent avoir droit de vie et de mort sur le quidam. Ils traqueront Lohman jusqu’au bout. Mais Lohman le leur rendra bien. Car malgré son éducation lettrée, il manie la carabine comme personne.
Le livre décrit un monde dur et violent qui pousse les hommes aux limites de la folie. Un monde en tout point aride, à l’image du désert que le héros traverse totalement démuni, manquant y trouver la mort. Cette aridité, on la retrouve aussi dans la narration dépouillée de Lohman, sobre bonhomme qui ne manque pas de maladresse quand il s’agit d’exprimer ses sentiments. Les épreuves qu’il connaît lui inspireront des réflexions sur le sens de la vie, sur l’injustice, sur la domination des faibles par les forts, lesquelles donnent au roman une puissance littéraire dépassant le seul western.
Vous voulez plus de romans westerns ?
Lisez donc les deux tomes de la série Lonesome dove, qui vous feront vivre le quotidien des cow-boys comme si vous y étiez.
À découvrir au rayon littérature adulte !
2. Thématique Elisabeth Ier : HAMNET par Maggie O'Farrell
Si le titre du roman de Maggie O’Farrell vous rappelle une célèbre pièce de Shakespeare, il n’y a là rien d’étonnant. Car Hamnet, le petit garçon dont il est question dans ce livre, n’est autre que le fils de Shakespeare. Ou plutôt du « précepteur », du « fils du gantier », du « jeune homme » comme le célèbre dramaturge est dénommé tout au long des 350 pages que compte l’ouvrage. Jamais Shakespeare n’est appelé par son nom. Il restera anonyme du début à la fin. Pourquoi ce choix ? Peut-être pour signifier qu’ici on va s’intéresser davantage à l’inconnu qu’à la célébrité. D’ailleurs, l’histoire pourrait n’avoir aucun lien avec Shakespeare. Elle pourrait être celle de n’importe quelle famille anglaise du 16e siècle, tant les thèmes qui y sont abordés sont ceux du commun.
Au fond, il est moins question de Shakespeare dans ce livre, que d’Agnes, sa flamboyante épouse un peu sorcière sur les bords, de leur histoire d’amour controversée, de leurs difficiles rapports à la famille, de leurs enfants et de la perte.
Car Hamnet est la chronique d’une mort annoncée. Le garçonnet va mourir. C’est établi d’entrée de jeu, sur la base d’un document historique. La seule extrapolation que se permet Maggie O’Farrell est la cause du décès : elle choisit la peste, comme un écho à notre actualité sanitaire teintée d’épidémie. Mais elle arrive si bien à nous entraîner dans ses va-et-vient temporels, à détourner notre attention en usant de poésie, que l’on finit par perdre de vue l’issue fatale et même, à en être surpris. La narration au présent, qui fait la part belle aux accumulations pour amplifier l’effet tragique, est absolument superbe.
Une œuvre en état de grâce.
Vous voulez plus de fictions sur Shakespeare ?
Regardez donc le film Shakespeare in love, une irrésistible comédie sentimentale en costumes avec Joseph Fiennes, Gwyneth Paltrow, Geoffrey Rush...
À découvrir au rayon cinéma !
3. Roman 7-10 ans : LES HÉRITIERS DE BRISAINE, TOME 1 par David Bry
Auteur de science-fiction pour adultes, David Bry n’hésite pas à mettre en scène des héros atypiques. Handicap, homosexualité : son œuvre prend des airs de manifeste pour la différence.
Dans le premier tome des Héritiers de Brisaine, sa nouvelle série jeunesse, cette caractéristique est beaucoup moins appuyée. Même si les brimades que le fils du seigneur fait subir aux indigents évoque la lutte des classes, même s’il existe un Ordre de Chevaliers aux allures de despote religieux, l’argument du livre reste une aventure fantasy tout ce qu’il y a de plus classique.
Au village de Trois-Dragons, les créatures magiques ont disparu suite à la guerre entre la Dame du Soleil et le Roi de la Nuit. Depuis, toute forme de magie est prohibée. Il n’y a que la vieille guérisseuse Brisaine pour oser encore en parler. Elle fait le bonheur des trois petits héros, Aliénor, Enguerrand et Grégoire, en leur racontant ce qu’elle sait à ce sujet. Jusqu’au jour où Aliénor disparaît dans la forêt attenante de Bois d’Ombres. Enguerrand et Grégoire vont devoir s’y enfoncer pour secourir la fillette, quitte à réveiller les vieilles malédictions…
On pense à Narnia, à Merlin l’Enchanteur et à tant d’autres encore. Le tout sublimé par les magnifiques illustrations de Noëmie Chevalier, au noir et blanc délicieusement gothique.
Les jeunes lecteurs y trouveront largement leur compte. Dès 9 ans.
4. Roman ado : OLYMPE DE ROQUEDOR par Jean-Philippe Arrou-Vignod et François Place
La France possède un trésor sous-estimé : ses auteurs jeunesse. Biberonnés aux feuilletonistes du 19e siècle, ils renouent avec la longue tradition du roman d’aventures qui a fait rayonner le pays bien au-delà de ses frontières.
Après Timothée de Fombelle, Jean-Claude Mourlevat ou Yann Fastier, c’est au tour de Jean-Philippe Arrou-Vignod et François Place de nous livrer une pépite littéraire, écrite à quatre mains.
Olympe de Roquedor, c’est un peu comme si Les trois mousquetaires d’Alexandre Dumas avaient rencontré La vouivre de Marcel Aymé. Le pays d’Azeillan, où se déroule le roman, évoque la campagne d’un 17e siècle fantasmé : ses routes poussiéreuses, ses orages soudains, ses sous-bois parfumés, ses croquants superstitieux, ses brigands de grands chemins… rien ne manque pour rendre l’aventure vivante.
Sans parler des dialogues ! Ils sont si fins, si croustillants, si naturels, qu’on rentre d’emblée dans l’histoire. À eux seuls, ils permettent de saisir toute l’originalité des personnages : Olympe, l’héroïne éprise d’indépendance fuyant un mariage forcé ; Foulques , petit nobliau arrogant écrasé par la figure paternelle ; Décembre, irrésistible mélange entre Don Quichotte, Cyrano de Bergerac et Jack Sparrow ; Oost, grand blond dégingandé, un peu stupide, qui fera un improbable allié…
En résumé : 300 pages de pur plaisir, qui laissent quelques questions sans réponse, nous permettant d’espérer une suite prochaine. Dès 12 ans.
Lizzo est nue sur la couverture de son album. Elle est sublime et elle a raison de le montrer, de le crier haut et fort.
De formation classique (flûte traversière), elle excelle assez tôt dans le rap et signe en 2016 un contrat chez Atlantic Records. Et justement, vocalement, on retrouve chez elle du Aretha Franklin et du Otis Redding (Jerome) et même du Kid de Minneapolis (CryBaby) toujours avec cette énergie, cette fougue et cette confiance qui lui sont propres.
Elle est femme, noire et ronde. Elle a la rage et beaucoup de choses à dire. Patience… elle est en passe de devenir une véritable icône R’n’b.
1. Rayon 3-6 ans : LA CROÛTE par Charlotte Moundlic et Olivier Tallec
Rares sont les œuvres qui vous prennent aux tripes. Celle-ci en fait partie.
« Maman est morte ce matin… » Dès la première phrase de cet album, presque camusienne, on sait que sa lecture va en être éprouvante, dure mais salvatrice.
Le dessin tout en retenue d’Olivier Tallec, d’habitude si drôle, fait la part belle au texte si juste de Charlotte Moundlic.
L’indicible douleur, le chagrin qui semble ne pas vouloir nous abandonner, à l’inverse des souvenirs du défunt qui s’étiolent, l’impuissance face à la souffrance des proches et la peur d’oublier : tous les sens en prennent un coup et c’est ce que va découvrir ce petit garçon héroïque.
Le plus bouleversant dans ce livre réside peut être dans le message d’espoir qu’il diffuse en toute fin.
Pathos ou simple réalité qui parfois frappent injustement ? Faites-vous votre avis.
Une chose est sûre, on ne sort pas indemne de cette lecture.
Un album utile pour un sujet grave qui peut nécessiter un accompagnement pour les plus sensibles. À partir de 5 ans.
2. Rayon 7-11 ans : L'AGENCE PENDERGAST par Christophe Lambert
Christophe Lambert n’a rien à voir avec l’acteur de Greystoke ou de Highlander. C’est un écrivain homonyme qui sévit depuis des décennies dans la littérature de genre et la littérature jeunesse. L’agence Pendergast, une de ses dernières séries en date, est un patchwork jubilatoire truffé de références à la culture populaire, depuis Harry Potter jusqu’à Tom Sawyer, en passant par Peter Pan, Le seigneur des anneaux, Le mythe de Cthulhu ou même Star Trek !
Le pitch est simple : Sean Donovan est un gamin des rues dans la New-York des années 1890. Par un concours de circonstances, il entre au service d’Archibald Pendergast qui dirige une agence secrète traquant les créatures magiques clandestines.
Au fil des 4 tomes disponibles à ce jour, Sean, accompagné de ses acolytes Célia et Joe l’Indien, va combattre Dracula en personne, traquer un monstre sanguinaire dans les égouts de la ville, s’engager comme artiste sur le Little Nellie pour résoudre le mystère de la sirène du Mississippi, et s’enfoncer dans les forêts du Wyoming sur les traces d’un Big Foot.
Rien de bien sérieux dans tout ça, hormis un vague discours sur la tolérance. Juste une bonne dose d’aventures qu’on lit d’une traite (les tomes illustrés ne font que 150 pages chacun) avec des personnages attachants.
À noter quelques scènes angoissantes avec projection d’hémoglobine ! Dès 10 ans.
3. Rayon 12-14 ans : ALEX FILS D'ESCLAVE par Christel Mouchard
La famille Dumas compte trois générations d’Alexandre : le père, le fils et le grand-père. On connaît très bien le père et le fils, lesquels sont devenus des auteurs classiques de la littérature française (« Les trois mousquetaires » ou « Le comte de Monte-Cristo » pour le premier, « La dame aux camélias » pour le second).
Christel Mouchard nous propose de découvrir la jeunesse du grand-père dans sa fiction historique Alex fils d’esclave. Né à Saint-Domingue (ancienne Haïti) d’un père blanc et d’une mère africaine, Alex est un jeune métis libre et insouciant. Jusqu’au jour où son père disparaît sans crier gare après avoir vendu toute la famille à un exploitant de canne à sucre ! Réduit en esclavage avec sa mère et sa sœur, Alex passe de mains en mains pour finalement atterrir dans la France du XVIIIe siècle, juste avant la Révolution. Il y retrouve son indigne de père qui lui révèle ses véritables origines. Commence alors une nouvelle vie pour le jeune homme. Une vie qui pourrait être légère et privilégiée, s’il n’y avait le souvenir de Saint-Domingue, des femmes restées là-bas et surtout de l’esclavage…
On savait plus ou moins que les Dumas avaient du sang métis. Tout l’intérêt du livre réside dans l’exploitation de ce pan de leur histoire. Même leur nom de famille, emblématique de la culture française, y trouve son origine, comme un beau pied-de-nez au passé esclavagiste du pays.
Un livre un peu succinct, dont le sujet aurait pu donner matière à une longue fresque, mais qui n’en reste pas moins très instructif. Dès 12 ans.
1. ALMA, TOME 1 : LE VENT SE LÈVE par Timothée de Fombelle
Timothée de Fombelle est un habitué de nos coups de cœur. Nous avions été emballés par son diptyque Vango, narrant la quête d’identité d’un jeune homme entre-deux-guerres.
La magie opère à nouveau avec sa dernière série Alma. Encore beaucoup de voyages et d’aventures au programme, entre Afrique, France et Caraïbes. Encore un bond dans le temps, en 1786 cette fois-ci. Le tout au service d’un sujet grave : la traite des esclaves.
On retrouve dans ce roman une belle brochette de personnages, du premier aux seconds rôles. Tous sont travaillés et nuancés, comme Timothée de Fombelle sait si bien le faire. Noirs et blancs, héros ou antagonistes, tous sortent du clivage manichéen. Survie et opportunisme dictent leurs motivations plus que n’importe quelle autre valeur morale. Chacun a ses torts et ses raisons.
Trois axes narratifs se dessinent dans ce premier tome : l’un autour d’Alma, jeune africaine vivant avec sa famille dans une vallée isolée du reste du monde, souvenir d’une Afrique édénique et inviolée ; un deuxième autour de Joseph, matelot débrouillard et culotté, manigançant quelque obscure entourloupe sur un certain navire négrier ; le dernier autour d’Amélie, héritière rêvant d’émancipation, et dont le père, armateur à la Rochelle, possède le même certain navire négrier. On guette l’instant où ces trois-là se rencontreront…
Au final, Alma se révèle un subtil mélange entre L’île au Trésor de Stevenson et Racines d’Alex Haley, entre roman d’aventures à l’ancienne et sensibilisation du jeune lectorat à l’esclavage. Avec en prime, les dessins de François Place, illustrateur et auteur à ses heures perdues, notamment du très étonnant La douane volante que nous vous recommandons également !
Pour ceux qui l’ignoreraient encore, J.K. Rowling n’est autre que la créatrice de la plus célèbre série jeunesse de notre temps : Harry Potter.
Elle s’était juré de ne plus jamais publier d’œuvre à destination du jeune public. Heureusement pour nous, il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis ! Nous ne vous en dirons pas plus sur la genèse de L’Ickabog, l’auteure s’en charge elle-même au début du livre.
Ce qu’il faut retenir, c’est que L’Ickabog n’a absolument rien à voir avec l’univers d’Harry Potter. Conte allégorique, il se déroule dans le pays imaginaire de Cornucopia. Un pays prospère jusqu’au jour où la couturière du roi Fred meurt à la tâche. Le roi culpabilise. Pour soulager sa conscience, il décide d’accomplir une action d’éclat en faveur du peuple. Pourquoi pas chasser l’Ickabog, ce monstre fabuleux censé vivre dans les marais du nord ? Tout le monde sait qu’il n’existe pas et que le roi ne craint rien dans cette expédition. Sauf que les choses ne vont pas se passer comme prévu…
J.K. Rowling décrit avec une redoutable efficacité et une cruauté glaçante l’escalade de la terreur. Ou comment une nation entière bascule du jour au lendemain dans une dictature répressive et obscurantiste. Les personnages peuvent paraître caricaturaux. Mais ils le sont à dessein, comme dans tout bon conte qui se respecte. Ils incarnent les mauvais penchants de l’âme humaine qui rendent possible une telle horreur : la couardise du roi Fred, la cupidité du conseiller Crachiney, le grégarisme du peuple.
Une formidable lecture à plusieurs niveaux. Les plus jeunes y verront un divertissement à l’intrigue bien ficelée. Les plus âgés apprécieront la satire sociale qui trouve largement son écho dans l’actualité, où manipulation des foules et dérives extrémistes sont plus que jamais à l’ordre du jour.
3. PROSPER REDDING, TOMES 1 & 2 par Alexandra Bracken
Vous considérez Tim Burton comme un dieu vivant du 7ème art ? Vous avez usé jusqu’à rupture le DVD d’Hocus Pocus, Les trois sorcières dans votre enfance ? Vous avez dévoré toutes les saisons des Nouvelles aventures de Sabrina disponibles sur Netflix ?
Si vous obtenez au moins un « oui » au questionnaire ci-dessus, les deux tomes de la série Prosper Redding, par l’américaine Alexandra Bracken, sont faits pour vous.
Le sujet ? Prosper, adolescent incompris et mal dans sa peau, habite Redhood, sinistre bourgade voisine de la fameuse Salem. Sa famille descend directement des pionniers ayant fondé la ville au 17e siècle. Elle a acquis pouvoir et richesse au détriment des clans rivaux en pactisant avec le démon Alastor. Ne vous laissez pas berner par l’apparence vulpine et pelucheuse de ce dernier, c’est un vrai pervers !
Bien sûr, Prosper ignore totalement ce versant peu glorieux de l’histoire de sa famille. Jusqu’au jour où son ignoble grand-mère essaie de le sacrifier devant toute sa parentèle réunie. Mais pourquoi Mamie est-elle aussi méchante ? Parce que malgré lui, Prosper est possédé par l’affreux Alastor. Mamie est bien décidée à rompre une fois pour toute le pacte liant le démon à sa famille, quitte à zigouiller sa propre descendance. Commencent alors pour Prosper la fuite, la planque, les interrogations, sous l’autorité d’un oncle débarqué d’on-ne-sait-où et de sa fille Nell, sorcière en herbe…
Ambiance d’Halloween, humour volontiers scatophile et rebondissements à gogos. Sans oublier une visite guidée des enfers dans le deuxième tome… avis aux amateurs de 12 ans et plus !
C’est bien connu : la littérature est une source inépuisable d’inspiration pour le cinéma et la télévision. L’arrivée des plateformes VOD n’y change rien. Netflix et consorts l’ont bien compris. Ils ne se privent pas d’exploiter le filon.
Parmi leurs récentes adaptations, il y en a une qui a fait florès : Enola Holmes.
Bien que distrayant et servi par un casting 100% pur british, le film s’éloigne parfois grossièrement de l’œuvre originale inventée par Nancy Springer, pour sacrifier à l’air du temps.
Dans les six livres qui composent la série littéraire, Enola Holmes est bien la sœur du célèbre détective Sherlock, et du moins célèbre gentleman Mycroft. En revanche, ce qu’elle n’est pas, c’est une experte en arts martiaux. Elevée à la campagne, loin de toute société, elle n’entretient pas de complicité particulière avec sa mère. Une des rares choses que toutes les deux partagent, c’est le goût pour les messages codés. Un goût qui se révèle très utile à Enola pour retrouver la trace de sa mère, quand celle-ci disparaît sans crier gare le jour de ses 14 ans. Ainsi que pour échapper à ses frères qui veulent la mettre en pension en découvrant sa situation isolée ! Forcée de fuir, Enola en profite pour s’adonner à la passion familiale : enquêter. Plus particulièrement : retrouver des lords et des ladys disparues… avec qui elle ne flirte pas, contrairement à ce que Netflix veut bien nous faire croire ! Dans sa quête d’indépendance, Enola reste seule jusqu’au bout, comme le laisse présager son prénom, anacyclique de l’anglais « alone ».
Beaucoup plus subtils que la version filmée, magnifiquement écrits et dotés d’un vocabulaire d’une grande richesse pour une œuvre estampillée jeunesse, les livres de Nancy Springer se dévorent les uns à la suite des autres comme des scones à l’heure du thé. Imprégnés d’un irrésistible esprit anglais malgré les origines américaines de l’auteure, émaillés de références culturelles et littéraires d’époque, ils abordent aussi des sujets de société comme la condition féminine au 19ème siècle ou celle des nécessiteux.
Egalement disponibles dans votre médiathèque : Les enquêtes d’Enola Holmes, tomes 1 à 6, adaptation en bandes-dessinées par Serena Blasco
2. SHERLOCK, LUPIN & MOI par Alessandro Gatti et Pierdomenico Baccalario
Forte de son succès, Enola Holmes a fait des émules !
Cette fois, point de petite sœur sortie de derrière les fagots. Mais un personnage féminin secondaire issu des aventures de Sherlock Holmes : Irene Adler. Pour simplifier, dans l’œuvre originale de Conan Doyle, Irene est à Sherlock ce que Catwoman est à Batman. Une rivale fascinante (voire plus si affinités) qui lui a fait subir l’une de ses plus cuisantes défaites…
Rajeunie sous la plume d’un duo d’auteurs italiens, Irene Adler nous raconte sa toute première rencontre avec Sherlock Holmes. Cela se passe à l’été 1870, dans la ville de Saint-Malo. Irene et Sherlock y séjournent avec leurs familles respectives. Ils ne sont encore que des adolescents. Un troisième larron, et pas des moindres, se joint à eux : Arsène Lupin. Si Irene est une fille à papa nourrissant des désirs d’émancipation, Sherlock fait déjà preuve d’une froide logique à la limite de la sociopathie tandis qu’Arsène affiche des airs de mauvais garçon adepte du déguisement et de la savate.
Comment ce trio infernal pourra-t-il résister à la découverte d’un cadavre sur la plage de Saint-Malo ? Il faudra bien plus que les interdictions des parents ou les intimidations de la pègre locale pour les détourner de ce mystère à résoudre. S’ensuivront d’autres nombreuses enquêtes au fil des 10 tomes parus à ce jour…
Beaucoup moins adulte et aboutie qu’Enola Holmes, cette série néanmoins fort sympathique offre une bonne entrée en matière pour les jeunes lecteurs désireux de s’initier au roman policier. Avec en prime, le 19ème siècle comme décor historique.
3. Bonus cinéma : LE SECRET DE LA PYRAMIDE par Barry Levinson
Mais les Italiens ne sont pas les premiers à avoir imaginé la jeunesse de Sherlock Holmes !
Arte nous l’a rappelé pendant les fêtes de fin d’année en rediffusant le film de Barry Levinson Young Sherlock Holmes, soit en français Le mystère de la pyramide.
Le film, tout comme ses interprètes, a vieilli depuis sa sortie officielle en 1984. Ses effets spéciaux un peu moins, les hallucinations de la scène d’ouverture faisant toujours sensation. Les personnages sont très bavards en comparaison des dialogues minimalistes caractérisant le cinéma actuel. Mais il y a dans l’œuvre cette légèreté, ce charme aventureux propres aux films jeunesse des eighties.
Pas étonnant quand on sait que Chris Colombus en est le scénariste. L’homme a travaillé sur d’autres titres cultes tels que Les Gremlins, Les Goonies, Maman j’ai raté l’avion… dont on retrouve ici l’atmosphère fantaisiste. Sans parler des deux premiers Harry Potter qu’il a réalisés des années plus tard !
D’ailleurs ce Secret de la Pyramide n’est pas sans évoquer l’univers magique du sorcier anglais. Son héros, le jeune John Watson, petit brun binoclard aux yeux bleus, lui ressemble beaucoup. L’école oxfordienne où il fait ses premiers pas rappelle grandement Poudlard, avec ses professeurs farfelus, ses élèves en uniformes et ses rivaux pédants style Drago Malefoy. C’est là-bas que Watson fait la connaissance de son voisin de chambrée Sherlock Holmes, escogriffe flegmatique et sûr de lui, qui l’embarque dans la résolution de morts mystérieuses liées au gourou d’une secte d’inspiration égyptienne. D’où la pyramide.
Dans cette affaire les deux adolescents sont aidés de la jolie Elizabeth Hardy. Ils forment avec elle un éphémère trio, précurseur du désormais célébrissime Harry-Ron-Hermione.
Quels sont les livres qui nous ont fait craquer en cette fin d’été ? Étrangement, peu de nouveautés. On laisse nos adhérents en profiter en priorité. L’occasion pour nous d’explorer les vieilleries. Après tout, ne dit-on pas que c’est dans les vieux pots qu’on fait la meilleure soupe ? Alors, prêts à vous régaler ?
1. Le secteur adulte vous propose : IL ÉTAIT DEUX FOIS de Frank Thilliez
En 2008, Julie, dix-sept ans, disparaît en ne laissant comme trace que son vélo posé contre un arbre. Le drame agite Sagas, petite ville au cœur des montagnes de Savoie, et percute de plein fouet le père de la jeune fille, le lieutenant de gendarmerie Gabriel Moscato. Ce dernier se lance alors dans une enquête aussi désespérée qu’effrénée…
Un thriller bien construit, qui aborde le thème de l’illusion et de l’amnésie suite à un stress intense. Une intrigue découpée tel un puzzle. Du Thilliez comme on l’aime ! Et une vraie nouveauté par-dessus le marché !
2. Notre saisonnier de l'été vous propose : MEG de Steve Alten
Meg de Steve Alten est à la fois un roman d’aventure et d’exploration maritime. On y suit le personnage de Jonas Taylor, un paléobiologiste et pilote de submersible travaillant pour la Navy. Il est traumatisé par sa dernière plongée au cours de laquelle il a aperçu un Carcharodon megalodon – plus communément appelé Meg – dans les profondeurs de la Fosse des Mariannes. Le Meg, ancêtre des grands requins blancs, long de dix-huit mètres pour vingt tonnes, est considéré comme le plus féroce prédateur de toute l’histoire. Rescapé de la plongée, Jonas clame alors sa découverte : l’espèce Carcharodon megalodon, que l’on pensait disparue, existe bel et bien. Mais ses employeurs, pensant qu’il a perdu la raison, le renvoie. Jusqu’au jour où un biologiste marin, Masao Tanaka, propose à Jonas de replonger dans la Fosse des Mariannes, afin de prouver sa découverte…
Ce livre plaira aux fans de Jurassic Park, ou encore à ceux des Dents de la mer. Le côté préhistorique et « chasse au gros poisson » est effectivement très présent dans le livre et rappelle plusieurs scènes des deux classiques signés Steven Spielberg. Les passionnés de Jules Verne y trouveront également leur compte grâce aux nombreuses scènes sous-marines évoquant Vingt mille lieues sous les mers.
3. Les secteurs adulte et jeunesse s'associent pour vous proposer : un double coup de ♥ sur le thème QUAND JANE AUSTEN RIME AVEC MAGIE !
Imaginez Jane Austen prenant le thé avec les frères Grimm et Napoléon Bonaparte. Bien sûr, cette rencontre historique n’a jamais eu lieu. Mais elle aurait pu, vu que ces quatre-là ont tous été contemporains. Bref, de quoi parleraient nos improbables convives pour accompagner leur earl grey ? De mœurs, de magie et de conquêtes, bien sûr !
Imaginez encore qu’un petit malin ait épié leur conversation et décidé d’en faire un livre. Cela aurait sans doute donné Jonathan Strange & Mr Norrell de Susanna Clarke. Car ce roman-univers (plus de mille pages !) contient tous les sujets susmentionnés : satire de la bonne société anglaise de la fin 18ème-début 19ème siècles ; renaissance d’une magie ancestrale donnant lieu à un débat idéologique entre un maître jaloux de son savoir et son élève prodige ; récit de batailles napoléoniennes pas tout à fait fidèles à la réalité, la magie venant en perturber le cours…
Foisonnant, érudit, passionnant, Jonathan Strange & Mr Norrell réunit les meilleurs ingrédients de ce que la littérature anglaise est capable de produire. Son auteure, Susanna Clarke, y fait preuve d’une imagination inépuisable. En témoigne le nombre ahurissant de notes de bas de page qui viennent enrichir le texte principal, sous la forme de contes de fées.
LE roman qu’on aimerait voir ne jamais s’arrêter. À découvrir sans tarder au rayon adulte !
Côté littérature jeunesse, on constate avec étonnement que l’oeuvre de Jane Austen est source d’inspiration pour nombre de nouveaux auteurs. C’est le cas d’Alison Goodman, avec sa série Lady Helen. Dès les premières pages, Alison Goodman revendique haut et fort son amour précoce pour la période de la Régence anglaise, théâtre des romans de Miss Austen, et de l’épopée napoléonienne. Un amour qui n’est pas feint comme le prouve la reconstitution fidèle et détaillée de cette époque. On prend plaisir à suivre la jeune Lady Helen Wrexhall dans ses mondanités entre bals, promenades au parc, présentation officielle à la reine et quête du meilleur parti conjugal. Mais aussi vexations diverses, liées à la condition féminine dans cette période conservatrice.
À cela vient s’ajouter l’élément fantastique : Lady Helen se découvre des pouvoirs hors du commun. Des pouvoirs qu’elle a hérité de sa mère et qui font d’elle l’objet de convoitise d’une mystérieuse société secrète, luttant contre de vicieux démons : le Club des Mauvais Jours. Si ce versant du roman est un peu excessif et parfois trop en décalage avec le volet historique, il n’en reste pas moins intéressant car il incarne pour notre héroïne une voie de salut, vers l’affranchissement des normes sociales.
Un roman jeunesse, certes, mais très mature dans son style et dans les thèmes abordés. À réserver aux plus âgés, 14 ans et au-delà !
Vos bibliothécaires adorés vous proposent de découvrir leurs coups de cœur en lien avec la thématique « Sorcières » mise en avant depuis le déconfinement :
1. Littérature adulte : UN BÛCHER SOUS LA NEIGE de Susan Fletcher
1692. Année traumatisante dans l’histoire des sorcières, inévitablement associée au nom de Salem, à l’hystérie collective, aux simulacres de procès, aux exécutions sommaires. Ça c’est pour le Nouveau Monde.
Et dans la vieille Europe ? Pas plus réjouissant ! Le roman Un bûcher sous la neige nous en donne un aperçu. Il nous emmène sur les landes sauvages d’Ecosse, au-delà d’une Angleterre crasse et obscurantiste. En 1692, le village de Glencoe a été le théâtre d’un massacre. Quasiment tout le clan MacDonald y est passé. Mais ces MacDonald, qui sont-ils ? Des querelleurs. Des fauteurs de troubles. Des partisans du roi Jacques II qui a fui en France après l’usurpation de Guillaume d’Orange. Personne ne les regrettera. Personne sauf Corrag la sorcière. Elle a survécu au massacre. Elle est aux fers. On va la pendre. Le révérend Charles Leslie a fait un long voyage pour recueillir son témoignage. Il veut savoir ce qui s’est réellement passé à Glencoe. Il y a des enjeux politiques derrière tout ça. Corrag accepte de lui révéler ce qu’elle sait. Mais d’abord il faudra que le révérend écoute l’histoire de sa vie. L’histoire de sa mère, femme bien trop libre et bien trop indépendante pour l’époque. L’histoire de sa fuite vers l’ouest sur le dos de sa jument grise. L’histoire de sa survie au contact d’une nature rude et magnifique. L’histoire de tous les marginaux qui ont croisé son chemin et en qui elle s’est retrouvée. Enfin l’histoire de ces rustres highlanders qui l’ont accueillie, elle, l’étrangère, elle, la sorcière. Un bûcher sous la neige est un roman de femmes, de nature, de solitude, de liberté, d’Histoire… un roman émouvant. Corrag est une héroïne attachante par sa fragilité et la simplicité de ses croyances. Son rapport au monde est d’une grande profondeur. Sa volonté d’y trouver sa place, universelle.
2. Documentaire adulte : SORCIÈRES, LA PUISSANCE INVAINCUE DES FEMMES de Mona Chollet
Une place… à condition de s’y tenir ! C’est le cruel constat qui émerge à la lecture du galvanisant essai de Mona Chollet, Sorcière : la puissance invaincue des femmes. Partant d’un fait historique établi, l’Inquisition, la journaliste en propose une relecture anthropologique inédite. Si l’idée selon laquelle la sorcière peut être considérée comme un symbole des femmes opprimées n’est pas nouvelle – Jules Michelet ayant développé cette thèse dès 1862 dans son livre La sorcière – Mona Chollet prolonge la réflexion pour en livrer une analyse sociologique. De ce travail de déconstruction ressort que les attentes de la société envers les femmes n’ont au fond pas vraiment évolué en deux siècles : maternité, soumission, beauté*. Et gare à celles qui s’écartent de la Sainte Trinité… Mais pourquoi tant de haine ? Par ignorance du féminin, et par peur. Car savoir, c’est pouvoir : les femmes, détentrices d’un savoir inédit, sont donc fabuleusement, dangereusement puissantes… Et La peur de quelque chose est la graine qui mène à la haine des autres, et la haine portée en soi finit par détruire celui qui la nourrit **. En réhabilitant la figure de la sorcière et en la sortant de son statut de victime, Mona Chollet déplace donc le curseur de la force, conférant à la femme toute sa place. Un essai lumineux et éclairant.
* A ce sujet nous vous recommandons la lecture du passionnant essai de l’auteur consacré au sujet, Beauté fatale.
** George Washington Carver, dont la citation passera à la postérité grâce à Maître Yoda dans La menace fantôme (1999)
3. Littérature jeunesse et cinéma : KIKI LA PETITE SORCIÈRE de Eiko Kadano et Hayao Miyazaki
Louées soient les éditions Ynnis ! Grâce à elles, le public français va enfin découvrir ce grand classique de la littérature jeunesse japonaise : Kiki la petite sorcière ! Série en 6 tomes, inédite en France, nous y suivons Kiki, apprentie sorcière de 13 ans, au moment où elle quitte ses parents. En compagnie de son chat Jiji, l’adolescente enfourche de nuit son balai à la recherche d’une ville où s’installer. C’est la tradition chez les sorcières. Mais choisir sa ville ne fait pas tout. En plus de s’établir, il faut mettre ses talents au service de la population. Or, des talents, Kiki n’en possède pas tant que ça. La seule chose magique qu’elle sait faire, c’est voler ! Heureusement que la boulangère Osono est là pour la guider. Grâce à ses conseils, Kiki trouve la solution : elle fera de la livraison à domicile sur son balai volant ! L’occasion de se faire plein d’amis et de démêler des situations plus farfelues les unes que les autres !
Une vraie friandise à lire, simple, gentille, légère, plus inspirée des classiques jeunesse occidentaux que du folklore japonais, et qui a contribué à créer, au pays du soleil levant, une iconographie de la sorcière toujours actuelle.
Mais on ne saurait parler de Kiki la petite sorcière, sans évoquer l’adaptation cinématographique du maître Miyazaki. Sortie en 1989, soit 4 ans après la parution du livre, elle en respecte l’esprit, surtout l’introduction très fidèle à l’original, tout en revisitant nombres d’épisodes dans la suite du récit.
Une fois de plus, les studios Ghibli livre une oeuvre enchanteresse, visuellement splendide et agréablement mis en musique par l’incontournable Joe Hisaishi. Les décors de la ville, ses maisons fleuries, ses commerces et ses automobiles rétro sont particulièrement soignés et détaillés. On aurait presque envie de prendre un billet pour aller y séjourner !
Pas étonnant qu’Eiko Kadono, initialement opposée aux changements apportés par le célèbre studio de dessins animés, ait finalement été séduite par un tel résultat !
4. Bande-dessinée : SACRÉES SORCIÈRES de Pénélope Bagieu
Un petit garçon orphelin vit avec sa grand-mère excentrique, fumeuse de cigare. Cette dernière lui révèle un secret : les sorcières existent, elles sont parmi nous et s’en prennent aux enfants… et ce n’est pas une blague !
La dessinatrice Pénélope Bagieu s’attaque au chef d’oeuvre de la littérature jeunesse du Britannique Roald Dahl (1916-1990), Sacrées sorcières. Elle s’inscrit d’abord dans une forme de continuité, en profitant de l’expertise du petit-fils de l’auteur, Luke Kelly. Le fil narratif reste inchangé : l’orphelin, la grand-mère loufoque et attachante, les sorcières qui masquent leur apparence horrifique sous un profil de normalité, le dessein morbide de tuer tous les enfants après les avoir réduits à l’état de souris, etc. L’autrice fait ensuite honneur au livre en créant un ouvrage dense, aux traits vifs, colorés et expressifs. Elle n’édulcore pas non plus les aspects sombres : la mort, omniprésente, que ce soit à travers l’accident des parents, l’action des sorcières ou l’âge de la grand-mère qui préoccupe le petit-garçon. Elle reste fidèle aussi à l’esprit déjanté : la grand-mère trop maquillée, fumeuse compulsive dont les traits traduisent générosité et amour.
Par ailleurs, elle s’affranchit du roman pour faire entrer Sacrées sorcières dans le XXIe siècle. Le petit garçon sans prénom va se faire une amie qui ne figurait pas dans le roman original. L’autrice reste cette artiste résolument féministe, déterminée à faire voler en éclats clichés et stéréotypes à travers ce personnage de petite fille foncièrement bonne, courageuse et autonome. De plus, les dialogues sont adaptés au ton d’aujourd’hui, mais sans effet de modernité abusive. Enfin, Pénélope Bagieu donne une véritable identité visuelle à l’histoire, s’affranchissant habilement des dessins de Quentin Blake, l’illustrateur des romans de Roald Dahl.
Presque 40 ans après sa sortie, Sacrées sorcières s’offre une adaptation flamboyante, qui non seulement ravira les jeunes lecteurs, mais agira aussi comme une madeleine de Proust sur les adultes.
On parlait du prototype de la sorcière créé par Eiko Kadano dans son oeuvre Kiki la petite sorcière. On en retrouve des traces dans le manga Flying Witch. Son héroïne, Makoto, plus âgée de 2 ans que Kiki, suit le même chemin qu’elle, mais en sens inverse : elle se met au vert pour parfaire son apprentissage de sorcière, et gagner son indépendance.
Avec 7 tomes publiés à ce jour, la série Flying Witch est une véritable ode à l’amitié et à la famille, à la douceur de vivre et à la vie au contact de la nature, aux instants partagés et à la rêverie. Rêverie parce que la magie que côtoient Makoto et ses proches en a tout l’air. C’est une magie innocente qui colore le quotidien comme une imagination fertile, une vision merveilleuse du monde. Avec elle, les nuages deviennent des baleines volantes, vestiges d’anciennes civilisations, on pourchasse les raies géantes qui se cachent dans les flaques de pluie, les cheveux noirs des demoiselles permettent d’invoquer des corbeaux, les petits garçons font pleuvoir dans la maison quand ils pleurent.
Pas d’intrigue suivie, de lutte contre le mal et de héros prophétiques, juste une succession de tableaux plus créatifs les uns que les autres, histoire de prendre son temps, de déguster la magie de la vie…
« C’est étonnant tout ce qu’on peut voir quand on reste simplement assis en silence, et qu’on regarde autour de soi. »
Le moins que l’on puisse dire, c’est que Calpurnia, l’héroïne du roman de Jacqueline Kelly, porte un prénom inhabituel. Il y a bien une épouse de César qui s’appelait Calpurnia. Et une aïeule de la famille Addams, « brûlée pour sorcellerie en 1706 », si l’on en croit Morticia Addams dans le premier film de Sonnenfeld… Que l’on se rassure, notre petite texane de « presque douze ans » ne connaîtra pas le même sort ! Seule fille d’une fratrie de sept enfants, l’été 1899 sera pour elle le théâtre d’une véritable épiphanie. Partant de l’observation des sauterelles, Calpurnia va se découvrir une âme de naturaliste. Elle sera encouragée dans ce sens par son grand-père, personnage fantasque et savant, qui l’initiera aux théories de Darwin.
Le quotidien de Calpurnia, c’est aussi celui de toutes les fillettes aisées de son époque : l’école, les leçons de piano, les repas en famille, les chamailleries avec ses frères, la pression maternelle pour la transformer en parfaite candidate au mariage. Sous des extérieurs innocents et puérils, les actes journaliers de Calpurnia laissent transparaître les réalités plus sombres de son temps : la guerre de Sécession, l’esclavagisme et surtout la condition féminine.
Le siècle nouveau, avec son cortège d’innovations technologiques, redistribuera-t-il les cartes ? Calpurnia y compte dessus pour échapper à la vie conjugale et se consacrer à la science.
Un roman jeunesse intelligent, rafraîchissant, qui change des sempiternelles aventures magiques et fait revivre avec douceur ce coin d’Amérique d’un autre siècle.
Egalement disponible dans votre Médiathèque au rayon Bande-dessinée :Calpurnia, la bande-dessinée
Mise en images par Daphné Collignon
Cote : BD CAL 1
Avis à tous ceux qui ont aimé L’épouvanteur de Joseph Delaney : les éditions Bayard publie une nouvelle série de l’auteur britannique ! Intitulée Aberrations, elle reprend les ingrédients qui ont fait le succès de sa grande sœur : dans une Angleterre aux allures médiévales-fantastiques, le jeune Crafty, que ses origines familiales dotent d’aptitudes magiques, est formé au dangereux métier de « mouche de porte » pour lutter contre le Shole, un brouillard maléfique transformant tous ceux qu’il recouvre en créatures cauchemardesques. Mais comme va très vite l’apprendre Crafty, il y a pire que les revenants, les monstres ou les sorcières cachés dans le Shole. Il y a les traîtres qui prennent un plaisir cruel à éliminer les « mouches de porte »…
Un premier tome efficace et prometteur, malgré la noirceur de l’atmosphère et la violence de certaines scènes (tortures, meurtres, transformations inhumaines). Pour lecteurs de 12 ans et plus. Âmes sensibles s’abstenir…
2. Arlo Finch, tome 1 : Le mystère des Longs Bois
Harry Potter chez les Castors Juniors !
On ne le dira jamais assez : la saga Harry Potter a révolutionné le monde de la littérature jeunesse. Elle a fixé des codes qui sont toujours d’actualité vingt ans après et que bon nombre « d’héritiers » se sont empressés de reprendre, y voyant la clé du succès. C’est le cas de John August, collaborateur du grand Tim Burton, avec sa nouvelle série Arlo Finch. Dans ce premier tome, le héros éponyme, Arlo, douze ans, se réfugie dans un village perdu du Colorado avec sa famille. Un village cerné par une forêt extraordinaire, les Longs Bois, qui pourrait bien être la frontière avec un autre monde. Autour d’Arlo, il y a les indispensables camarades façon Ron et Hermione, en compagnie desquels il découvrira la magie des lieux ainsi que son potentiel insoupçonné. Il ne manque plus qu’une école des sorciers pour parfaire le tableau. Oui mais non ! Parce que nos héros ne sont pas des sorciers mais des rangers. Ou si vous préférez des scouts, façon Castors Juniors cette fois-ci. C’est là la véritable originalité de cet univers au demeurant sympathique, qui mêle magie et apologie de l’esprit de groupe. Dès 10 ans.
3. L’île des disparus, tome 1 : La fille de l’eau
Une reine du polar en territoire jeune !
Valeur montante des romans policiers pour adultes, Viveca Sten s’associe avec sa propre fille Camilla pour nous livrer une série jeunesse inédite L’île des disparus. Si ce premier tome ne manque pas de références (certaines parfaitement assumées comme Twilight), il n’en possède pas moins des atouts propres. Et quels atouts ! Un univers original, inspiré des croyances populaires nordiques. Une ambiance inquiétante et glacée à l’image des îles suédoises où l’action se déroule. Une intrigue bien ficelée où s’exprime la maestria de l’auteur en matière de suspense. Un style singulier, à la première personne et au présent, qui nous permet une empathie totale avec Tuva, héroïne et narratrice de l’histoire. Cette dernière est une collégienne de douze ans pas vraiment comme les autres. Parce que, bébé, elle a miraculeusement survécu à un accident de bateau qui aurait dû lui coûter la vie. Et parce que depuis, une réputation de monstre de foire lui colle à la peau. La situation ne s’arrange guère lorsqu’elle se retrouve mêlée à la disparition mystérieuse d’un garçon populaire du collège. Sans parler des phénomènes surnaturels qui accompagnent cette disparition ou de l’angoisse que ressent Tuva à proximité de la mer…
Totalement addictif ! Vivement la suite !
Pour ados et adultes décomplexés.
FICHE TECHNIQUE :
Titre : Au bureau des objets trouvés
Auteur : Junko Shibuya
Année publication : 2016
Cote : A. SHI
Monsieur Chien travaille au bureau des objets trouvés.
L’occasion pour lui et pour nous de faire connaissance avec un tas d’animaux et d’apprendre que les apparences sont parfois trompeuses…
À chaque page, l’enfant tente de deviner quel est l’animal qui a perdu son ou ses accessoires.
Un livre à partager, qui suscite l’intérêt des jeunes lecteurs par ses répétitions et devinettes.