On a été électrisé par LES DERNIERS JOURS DE L’ÉMERVEILLEMENT de Graham Moore

FICHE TECHNIQUE :
Titre : Les derniers jours de l’émerveillement
Auteur : Graham Moore
Pays : États-Unis
1ère année de publication : 2016

Cote : RH. MOO

 

« Un filament porté à incandescence le révélait à lui-même tel qu’il ne se serait jamais imaginé. »

 

George Westinghouse

Englués dans notre confort moderne, nous n’avons plus conscience de ce qui se cache derrière les petits gestes du quotidien. Par exemple : allumer la lumière. Qu’y a-t-il de plus anodin et de plus insignifiant ? Nous avons oublié que pour en arriver là des cerveaux brillants, des juristes plus ou moins bien intentionnés et des financiers souvent cupides se sont livrés une âpre bataille.
C’est cette bataille que Graham Moore, jeune scénariste hollywoodien auréolé d’un Oscar, se propose de nous raconter dans Les derniers jours de l’émerveillement.

Thomas Edison

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, son livre n’est pas un documentaire. C’est un roman, dans la plus pure tradition. Son héros, Paul Cravath, n’est autre que l’avocat de Georges Westinghouse, rival de Thomas Edison dans la « Guerre des courants électriques ». Une guerre qui eut pour cadre le New-York de la fin du dix-neuvième siècle, et qui, comme toutes les guerres, ne se fit pas sans victimes. On pense notamment à la scène d’ouverture, ou encore à celle de la chaise électrique, horribles, l’une comme l’autre. Et pourtant tout ce qu’il y a de plus authentiques.

Nikola Tesla

L’ambitieux Paul mène une enquête juridique passionnante, pleine de rebondissements, d’échecs et de déconvenues jusqu’au coup de théâtre final. Grâce à lui et à sa méconnaissance scientifique, on rentre progressivement dans l’univers des inventeurs, sans jamais être noyé sous le jargon technique. Les explications sont simples, claires et justement dosées. Les chapitres courts facilitent la lecture et donnent envie d’aller toujours plus loin. Autour du jeune avocat gravitent quantité de personnages historiques hauts en couleur. Mention spéciale à Nikola Tesla, irrésistible savant fou au phrasé si particulier. Ainsi qu’à la jeune et jolie Agnes Huntington qui apporte quasiment à elle seule la touche féminine dans cette aventure essentiellement virile. Jeune et jolie, certes, mais pas potiche pour autant !

On s’est régalé avec LES DÉLICES DE TOKYO de Durian Sukegawa

FICHE TECHNIQUE :
Titre : Les délices de Tokyo
Auteur : Durian Sukegawa
Pays : Japon
1ère année de publication : 2013

Cote : R. SUK

 

« Dans la vie aussi, il y a des changements de saison. »

 

Dorayakis

Le dorayaki est une pâtisserie japonaise constituée de deux pancakes fourrés à la confiture de haricots rouges. Avant janvier 2016, qui, dans l’Hexagone, connaissait cette sucrerie aux saveurs inhabituelles ?
Sans doute peu de monde en dehors des amateurs de culture nipponne.
Puis vint le film de Naomi Kawase,  Les délices de Tokyo, qui contribua largement à populariser le dorayaki. Le film permit aussi au public français de découvrir le livre de Durian Sukegawa dont il est une adaptation.

Ce livre s’ouvre sur la rencontre de Sentarô, ancien détenu en perdition, avec Tokue, sympathique grand-mère aux doigts tordus. Malgré son grand âge, Tokue insiste pour travailler avec Sentarô dans la boutique de dorayakis qu’il dirige tant bien que mal. Telle une bonne fée tombée du ciel, elle lui apprend à confectionner une confiture de haricots rouges digne de ce nom. Les dorayakis gagnent en qualité et la boutique en clientèle.
Mais un jour les clients ne viennent plus. Des rumeurs circulent à propos de Tokue. Ses doigts tordus cacheraient un secret inavouable…

Cerisier en fleur

Qu’on se le dise, Les délices de Tokyo ne parle pas que de pâtisserie. Ce n’est pas une success-story américaine où tout réussit aux héros. Sentarô et Tokue sont des naufragés de la vie qui cherchent à garder la tête hors de l’eau. À l’image du style épuré de l’auteur, leur relation froide et gênée devient, au fil des pages, plus humaine, plus poétique et philosophique. Il faut bien ça pour donner du sens à sa vie, quand elle a été broyée par une société pleine de tabous.
Comme souvent dans les œuvres japonaises, des humains brisés sont réunis par le destin et forment une improbable famille. C’est grâce à cette famille que l’espoir peut renaître, sous le patronage de l’éternel cerisier, dont les métamorphoses saisonnières évoquent le rythme bienveillant de la Nature.

 

Également disponible dans votre médiathèque, au rayon Cinéma :
Titre : Les délices de Tokyo (le film)
Réalisatrice : Naomi Kawase
Acteurs : Masatoshi Nagase, Kirin Kiki, Kyara Ushida…
Date de sortie en France : 27 janvier 2016

Cote : F KAW

On a dévoré NOS RICHESSES de Kaouther Adimi

FICHE TECHNIQUE :
Titre : Nos richesses
Auteur : Kaouther Adimi
Pays : Algérie
1ère année de parution : 2017

Cote : R. ADI

 

« Il n’est jamais simple d’être heureux à Alger, même débarrasser une librairie et filer se transforme en épopée ! »

 

Rue d’Alger

Avec Nos richesses, Kaouther Adimi ne nous offre pas un ouvrage mais trois. Elle raconte d’abord Alger, magnifiée dans une superbe introduction touristique, où le style précis, épuré mais néanmoins poétique de l’auteure fait des merveilles. Dans cette Alger de 2017, la bibliothèque « Les vraies richesses » ferme définitivement ses portes. Le jeune Ryad est chargé de nettoyer l’endroit. Mais son travail ne se fera pas sans mal. Car la bibliothèque a une histoire. Autrefois c’était une librairie. Et son fondateur, Edmond Charlot, un pionnier, ami de Camus et de tant d’autres.

Même si le jeune Ryad n’aime pas les livres, il ne peut rester insensible à un tel passé qu’il sent peser sur lui. D’autant plus qu’Abdallah, ancien gardien des lieux, ne le lâche pas d’une semelle. Ah ! Les dialogues entre Abdallah et Ryad ! Un vrai régal ! Et toute la vie grouillante d’Alger, en toile de fond : c’est si drôle, si tendre, si authentique !

À côté de cette Alger contemporaine, nous découvrons le journal intime d’Edmond Charlot lui-même, entre 1935 et 1961, depuis l’ouverture de la librairie « Les vraies richesses » jusqu’à son retour au pays, après avoir tenté sa chance à Paris.

Edmond Charlot

On sait que l’Histoire avec un grand H n’a pas épargné l’Algérie pendant cette période : colonisation, seconde guerre mondiale, indépendance… C’est l’occasion pour l’auteure de resituer la petite histoire dans la grande. De rappeler toutes les vexations subies par le peuple algérien.

Tenant la promesse de son titre, Nos richesses est un concentré de deux-cents pages qui se lit d’une traite, comme on déguste un thé à la menthe : un tiers de sucre pour la douceur, un tiers de menthe pour la fraîcheur, un tiers de thé pour l’amertume.

On s’est laissé envoûter par LE TREIZIÈME CONTE de Diane Setterfield

FICHE TECHNIQUE :
Titre : Le treizième conte
Auteur : Diane Setterfield
Pays : Grande-Bretagne
1ère année de parution : 2006

Cote : R. SET

 

« Le silence n’est pas l’environnement naturel des histoires. Elles ont besoin de mots. Sans eux, elles se fanent, s’étiolent et meurent. Et pour finir, elles vous hantent. »

 

Manoir hanté ?

Mieux que Jane Austen, Agatha Christie et J.K.Rowling réunies, Vida Winter, personnage central du Treizième conte, est la plus grande écrivaine que l’Angleterre ait donnée au monde. C’est aussi « une raconteuse d’histoires, une fabulatrice, une menteuse ».  À tous les biographes qui sont venus frapper à sa porte, elle n’a servi que bobards, fables, salades. Elle s’est inventé mille vies, sans jamais vraiment raconter la sienne.

Mais le temps n’est plus aux duperies. L’énigme vivante qu’incarne Vinda Winter se meurt. Il faut maintenant passer aux aveux. Le besoin se fait pressant. Alors Miss Winter engage une biographe, Margaret Lea. Margaret n’est pourtant qu’une libraire. Elle n’écrit qu’en dilettante. Mais Miss Winter l’a choisie elle. C’est à Margaret qu’elle veut confier son histoire et parler de sa famille, les Angelfield.

Hallucination ou vraies jumelles ?

Manoir biscornu, secrets de famille, folie, apparitions et brouillard qui vous pénètre jusqu’à la moelle… Diane Setterfield a réuni tous les ingrédients pour recréer une Angleterre mystérieuse, digne des sœurs Brontë et consorts, auxquels son roman rend hommage. Dans ce jeu de miroirs et de faux-semblants, chaque personnage porte en lui ses propres blessures, recherche ses propres réponses, tout en faisant écho à celles des autres protagonistes.

Diane Setterfield décrit avec un style puissant la quête de soi et de ses origines, le désespoir et l’absence, mais aussi le processus d’imagination. Beaucoup de ses phrases ont l’étoffe d’une citation. Elles contribuent à faire du Treizième conte une de ces histoires qui, même formalisées avec des mots, vous hantent durablement. Pas étonnant que la BBC en ait tiré un téléfilm en 2013, avec Vanessa Redgrave dans le rôle de Vida Winter !

On a été conquis par LE TOUR DU MONDE DU ROI ZIBELINE de Jean-Christophe Rufin

FICHE TECHNIQUE :
Titre : Le tour du monde du roi Zibeline
Auteur : Jean-Christophe Rufin
Pays : France
1ère année de parution : 2017

Cote : R. RUF

 

« Il y a deux manières opposées et cependant comparables de punir un homme : le condamner à l’enfermement ou le jeter dans l’infini. »

 

Maurice Auguste Benjowski

Avec un titre digne des Mille et une nuits, Le tour du monde du roi Zibeline n’est pas moins inspiré de faits réels. Plus encore, de faits historiques.

Pour construire son roman, Jean-Christophe Rufin s’est servi des authentiques mémoires d’Auguste Benjowski, nobliau hongrois du dix-huitième siècle. Déshérité et exilé du pays natal, condamné au bagne du grand nord kamtchadale, Benjowski va devenir successivement esclave, rebelle, capitaine de navire, explorateur, missionnaire pour le compte du roi de France et lui-même roi éphémère de Madagascar, où il laissera une empreinte durable.

Mais Benjowski va aussi connaître l’amour, le seul, le vrai, en la personne de son épouse Aphanasie. Aphanasie qui renoncera à tout pour le suivre au travers des pires dangers. Aphanasie qui, même si elle est un personnage autant fictif que réel, contribue grandement à toucher le lecteur. Grâce à elle, Rufin instaure un procédé narratif original : le récit à deux voix.

En route pour l’aventure !

Face à un Benjamin Franklin tout yeux et tout oreilles, le couple Benjowski, venu en visiteur, raconte son périple. Auguste évoque les faits avec détachement, voire insensibilité, tandis qu’Aphanasie n’est que sentiments et sincérité. Avec elle, nous découvrons l’époque, ses mondanités, ses froufrous, ainsi que les tracas de la vie conjugale. L’homme et la femme se relaient. Ils se complètent à merveille.

Alors, certes, dans ce Tour du monde du roi Zibeline, il n’y a pas de djinns ni de tapis volants. Mais il y a tout de même une forme de magie. On pense à Marco Polo, aux grands navigateurs et aux flibustiers. Bref, c’est la magie de l’aventure, la découverte de territoires mystérieux, en même temps qu’un bel enseignement sur un pan méconnu de l’Histoire.

On a lu et on a aimé : MORWENNA de Jo Walton

FICHE TECHNIQUE
Titre : Morwenna
Auteur : Jo Walton
Pays : Grande-Bretagne
1ère année de parution : 2010

Cote : SF. WAL

 

« Y a-t-il simplement des fées en Amérique ? S’il y en a, parlent-elles toutes gallois là-bas aussi ? »

 

Une fée-insecte ?

Grande-Bretagne, à la fin des années soixante-dix.
Morwenna Phelps, adolescente de quinze ans, meurtrie dans sa chair et dans son âme suite à l’accident qui l’a estropiée et qui a coûté la vie à sa sœur jumelle, nous ouvre les pages de son journal intime.

Dans ce journal, il n’y a pas que des drames. Morwenna n’est d’ailleurs pas du genre à s’apitoyer. C’est une héroïne tragique mais courageuse. Et lunaire. Parce que Morwenna croit en la magie. Elle voit les fées. Ces créatures n’ont pourtant rien à voir avec la Clochette de Disney. Elles lorgneraient plutôt du côté de la fée-insecte du Labyrinthe de Pan. Elles sont aussi sauvages et mystérieuses que le Pays de Galles où Morwenna a grandi. Un Pays de Galles riche en folklore, mais aussi ouvrier, déshérité, à l’image des films de Ken Loach. Pour preuve : c’est dans ses ruines et ses usines désaffectées que les fées ont élu domicile.

Mais la magie est-elle bien réelle ? N’existe-t-elle pas que dans la tête de Morwenna, comme un soutien l’aidant à surmonter les dures épreuves de la vie ?

Collines du Pays de Galles

Roman d’ambiance, le livre de Jo Walton explore cette période trouble qu’est l’adolescence, entre fantasme et réalité. Il y est question du deuil, de la famille et de la complexité de ses relations, de l’infirmité et de la volonté, plus forte que tout, de se reconstruire. Des sujets universels, qui touchent tous les âges.

C’est aussi une déclaration d’amour à la littérature de science-fiction, passion salvatrice qui va permettre à la jeune héroïne d’aller de l’avant. Une héroïne si attachante, qu’on la regrette sitôt la lecture achevée.